samedi 30 avril 2016

Haute-Vienne (mars 2016)

Sur le chemin du souvenir...

Oradour-sur-Glane




Capture d'écran (Via Michelin) et localisation de l'aire cc et du parking.


Nous arrivons à la nuit tombée et nous nous installons aussi discrètement que possible sur l'aire de camping-car qui se trouve à environ 800 mètres du village martyr. Tous les stores de nos voisins sont déjà tirés !


L'aire de services et en face les sanitaires

Un seul camping-car mal garé et ce sont des Anglais, à eux seuls avec leur fourgon bleu, ils prennent deux places...

Je suis curieuse et j'adore découvrir les villes et villages que nous traversons, ressentir l'énergie des hommes et femmes qui les ont modelés, m'attarder devant une sculpture, un beau jardin, un porche...un chat qui se dore au soleil, tous ces infimes signes de la vie quoi !
Et depuis longtemps, je voulais voir Oradour-sur-Glane, mais Oradour c'est autre chose ; c'est un pan bien sombre de notre histoire, c'est l'horreur, c'est l'homme dans tout ce qu'il a de plus malfaisant, c'est l'idéologie dans ce qu'elle a de plus noir, c'est l'IGNOMINIE !
Le nouveau village a été reconstruit aux portes de l'ancien.
Entre les deux, trône le Monument aux Martyrs d'Oradour, œuvre du sculpteur espagnol Apel les Fenosa qui l'a modelé durant l'hiver 1944/1945.
Au sommet d'une haute colonne, une femme enceinte dévorée par les flammes, tordue de douleur, lève les bras vers le ciel.
La force de cette statue alliée à la phrase de Paul Éluard inscrite sur la colonne est un préambule à ce que je m'apprête à voir.
Les mots d'Éluard :
"Ici des hommes feront à leurs mères et à toutes les femmes la plus grave injure : Ils n'épargnèrent pas les enfants."

Seuls la route et un pré séparent Oradour-sur-Glane du village martyr dont on voit l'enceinte et les premières maisons.






Je ne fais que traverser le Centre de la Mémoire. Il est certainement très intéressant, mais après tous les documentaires et articles vus et lus, il me tarde de pénétrer dans le village martyr.



L'entrée du Centre de la Mémoire, il faut le traverser pour parvenir à l'entrée du village.

Arrivée devant l'enceinte qui mure le village, ces simples mots : "Souviens-toi" "Remember".



Et je me trouve dans une rue déserte, qui monte légèrement pour parvenir au centre.
Des maisons effondrées, des murs noircis, de la ferraille tordue sous l'effet de la chaleur de l'incendie.
Il est très tôt, pas un bruit, peut-être dix personnes en tout et pour tout sur le site et c'est angoissant...pas que j'ai peur, mais au milieu de ces ruines, le silence "hurle" le drame atroce qu'ont vécu les habitants.
Mais dans le même temps, j'essaie d'imaginer la vie : Un petit village au milieu de la campagne limousine...des jeunes préoccupés par le match de foot du lendemain,  des enfants en bas âge qui jouent sous la surveillance de leur mère, des femmes échangeant quelques mots en se croisant, le bruit du forgeron tapant sur son enclume, les commerçants s'activant pour satisfaire la clientèle, le tram qui charge et décharge les passagers qui arrivent ou partent pour Limoges, les touristes sur la terrasse de l'hôtel, les chiens et chats traînant dans les rues, des vaches en chemin pour le pré...

En ce samedi 10 juin 1944, c'est le jour de la distribution de tabac. C'est une belle journée de début d'été qui s'annonce et pourtant.....
...Quel jour funeste !
Une division blindée SS Das Reich encercle et pénètre dans le village.
Elle n'en était pas à sa première "exaction", la veille déjà, elle avait sévi  à Tulle, pendant 99 hommes aux balcons et réverbères de la ville.
Mais jamais, elle n'avait atteint l'horreur à une telle échelle !
Les villageois n'avaient jamais auparavant vu d'Allemands en ce lieu.
Sous prétexte d'un contrôle d'identité, ils ont rassemblé toute la population sur le champ de foire, tout s'est fait dans le calme, ils n'étaient pas agressifs du tout et la population ne s'est pas méfiée.
Ils ont alors séparé les hommes des femmes et des enfants pour les massacrer.
Et ils partiront ne laissant derrière eux que cendres et désolation, la mort et le vide !
En ce samedi noir, 642 personnes furent tuées et brûlées, seuls 5 hommes, une femme et un enfant de l'école enfantine et des Lorrains ont pu échapper au massacre.
Parmi les martyrs, la grand-mère la plus âgée avait 90 ans et le bébé le plus jeune seulement une semaine.

L'ancien poids public ?


Dans ce puits, des corps ont été trouvés mais en si mauvais état qu'ils y sont restés, le puits a alors été bouché.




Chez la dentiste  Mme Reignier.
Des plaques comme celle-ci ont été placées devant de nombreuses maisons pour définir l'activité de ceux et celles qui les habitaient.

Des plaques ont été placées sur quelques maisons et granges du village aux endroits où les groupes d'hommes ont été abattus par les nazis.


Chez le courtier M. Picat

La gare du tram -  Le tram a continué à traverser les ruines du village pendant 9 ans après le drame.

Quel sentiment étrange d'apercevoir la vie au-delà de l'enceinte !


Le bureau de postes et télégraphes



En zoomant, j'aperçois même le parking. Nous avons quitté l'aire pour le parking le temps de la visite





Un café au second plan, habitait aussi ici la couturière D. Gagoury (Chez Denise).


En haut de la rue principale devant le café. Le village avait déjà l'électricité en 1911, date de la mise en place du tram.
Celui-ci faisait 3 allers-retours par jour vers Limoges.


Un ancien téléphone ?


La mairie et l'école des garçons












Le garage de M. Poutaraud


La pompe à essence du garage de M. Poutaraud

Chez le forgeron J.-B. Beaulieu

Chez le forgeron


La pharmacie de M. Pascaud

Le salon de coiffure de M. Petit (Chez Marcelle)

L'école des filles

L'entrée et/ou la cour de l'école des filles ?


La boulangerie de L. Bouchoule

Le four de la boulangerie dans la rue Émile Desourteaux





La boucherie de A. Lanot










L'église et la halle dont il ne reste que la base des piliers

Café-coiffeur "Chez Lucien"







La place de l'église

L'entrée de l'église


Le minuscule tas de ferraille à droite devant l'autel est tout ce qui reste d'un landau

Le village n'avait pas de monument aux morts de la guerre 1914-1918, seule cette plaque commémorative dans l'église qui a été criblée de balles.

La voûte de l'église n'est tombée que deux ou trois mois après le massacre

Deux petits garçons calcinés ont été retrouvés dans le confessionnal, tous les autres corps n'ont pu être identifiés, il ne restait plus qu'ossements et cendres.





La croix qui se trouvait en haut de l'église

C'est tout ce qu'il reste des deux cloches qui ont fondu.


Un hôtel-restaurant

La terrasse du café central


La pompe à essence

L'arrière de l'église - C''est du vitrail central qu'a pu s'échapper Mme Marguerite Rouffanche, seule rescapée de la tuerie dans l'église. Elle a grimpé sur un escabeau placé derrière le maître-autel, destiné à allumer les cierges et a sauté par l'ouverture béante du vitrail. Après une chute d'un peu plus de trois mètres et atteinte de plusieurs balles, elle a du attendre les secours jusqu'au lendemain.

Chez le feuillardier M. Senon







Dans l'atelier du charron

École enfantine et des Lorrains - Seul un enfant a pu échapper au massacre. En effet, Roger Godfrin âgé de 7 ans, petit réfugié lorrain s'est enfui de la classe à l'arrivée des SS.



La grange Laudry dans laquelle ont été enfermés 62 hommes.


La grande Laudry - De cette grange seuls 6 hommes ont survécu, recouverts par les morts, les nazis les ont cru morts. 5 ont pu se réfugier dans les bois alentours, le 6ème a été abattu dans sa fuite.


Le puits et le champ de foire où la population a été rassemblée pour "le contrôle d'identité".



Le champ de foire

Le champ de foire


L'intérieur d'un café


Chez le forgeron J. Depierrefiche

La voiture du docteur J. Desourteaux


La voiture du docteur J. Desourteaux en bas du champ de foire



Il est temps pour moi de quitter ce village après une visite aussi émouvante qu'éprouvante, un demi-tour pour un dernier regard...


 Le 5 mars 1945, le général de Gaulle en visite à Oradour-sur-Glane a décrété que le village resterait à tout jamais en France le symbole de la barbarie nazie.
Et c'est ainsi que le village martyr est devenu propriété de l'État. En 1953, il a été entouré d'un mur d'enceinte.
Le nouveau village a été construit sur les terres agricoles.



La place de l'hôtel de ville






Le monument aux morts dans le village reconstruit domine les ruines

C'est une visite que l'on n'oublie pas, qui laisse bien des interrogations quant à la noirceur de l'âme humaine.
Au cours de l'écriture de cette page, j'ai fait quelques recherches et particulièrement aimé ce documentaire de Michel Dailloux. A ceux qui ont 45 minutes supplémentaires à consacrer à Oradour, c'est ICI